
La requête aux fins de désignation d’un administrateur provisoire d’une copropriété dépourvue de syndic peut être déposée et l’ordonnance le désignant être rendue alors même que le mandat du syndic précédemment désigné n’est pas expiré, s’il existe un risque qu’un nouveau syndic ne soit pas désigné et si la prise de fonction de l’administrateur intervient à l’expiration du mandat du précédent syndic (Cass. civ. 3, 20-12-2018, n° 17-28.611, F-P+B+I).
En l’espèce, le propriétaire de lots dans un immeuble soumis au statut de la copropriété avait sollicité la rétractation de l'ordonnance, rendue sur requête du syndicat des copropriétaires et d'un copropriétaire, désignant un administrateur provisoire. Il a été débouté de sa demande par les juges du fonds.
Il doit être rappelé que le décret du 17 mars 1967, pris en application de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, prévoit deux hypothèses dans lesquelles il peut être judiciairement remédié à l’absence de désignation d’un syndic :
- L’article 46 du décret du 17 mars 1967 envisage l’hypothèse dans laquelle aucun accord n’a été trouvé sur la désignation du syndic à l’occasion d’une assemblée générale appelée à statuer sur cette question : à la requête notamment d’un ou plusieurs copropriétaires, le président du Tribunal de grande instance doit désigner un syndic judiciaire ;
- L’article 47 du décret du 17 mars 1967 envisage l’hypothèse de l’absence de syndic pour une raison autre que celle de l’absence d’accord des copropriétaires sur sa désignation à l’occasion d’une assemblée générale appelée à statuer sur cette question (par exemple, mandat du syndic expiré et absence de convocation d’une assemblée générale appelée à statuer sur la désignation du syndic) : à la requête de tout intéressé, le Président du Tribunal de grande instance doit désigner un administrateur provisoire.
Dans l’arrêt rapporté, l’assemblée générale du 22 mars 2016 qui devait statuer sur la désignation du syndic ne s’était pas tenue. Seul un administrateur provisoire pouvait donc a priori être judiciairement désigné.
Cependant, à la date à laquelle la requête avait été déposée (24 mars 2016) et à celle de l’ordonnance désignant l’administrateur provisoire (31 mars 2016), le mandat du syndic précédemment nommé était toujours en cours car il expirait le 31 mars 2016.
Le copropriétaire qui contestait la désignation de l’administrateur provisoire soutenait dans le cadre de son pourvoi que ce n'est que lorsque le syndicat des copropriétaires est dépourvu de syndic à la date d'introduction de la requête qu’un administrateur provisoire peut être judiciairement désigné.
Son pourvoi a été rejeté.
La Cour de cassation a tout d’abord précisé qu'un administrateur provisoire ne peut être désigné sur le fondement de l'article 47 du décret du 17 mars 1967 que si aucun mandat de syndic n'est plus en cours.
Elle relève ensuite que lors du dépôt de la requête, le 24 mars 2016, le syndicat des copropriétaires, ainsi qu'un copropriétaire, avaient, en raison du risque d'absence de syndic après le 31 mars 2016, sollicité la désignation d'un administrateur provisoire à compter de l'expiration du mandat en cours.
Le 31 mars 2016, le Président du Tribunal de grande instance avait accueilli la demande.
Il en résultait que le mandat du syndic avait expiré lors de la prise de fonction de l'administrateur provisoire qui pouvait donc être valablement désigné.
Julien PRIGENT
MUTELET-PRIGENT & ASSOCIES
Avocats à la cour d’appel de Paris