Expertise judiciaire : faute et responsabilité de l’expert judiciaire

Engage sa responsabilité à l’égard du maître d’ouvrage, l’expert judiciaire qui n'a pas pris les mesures nécessaires pour apprécier la gravité du désordre et son degré évolutif et qui a formé des préconisations insuffisantes, contribuant ainsi à la persistance du désordre (Cass. civ. 3, 11-03-2015, n° 13-28.351, FS-P+B).

En l’espèce, le maître d’ouvrage avait confié à une société la réalisation d'une piscine. Des désordres étant apparus sur la piscine, une expertise avait été ordonnée. L’expert avait déposé son rapport en concluant à une erreur de conception et en préconisant de remplacer les éléments de margelle fissurés après stabilisation du phénomène de flexion de la paroi.

 

Des désordres étant réapparus, le même avait été judiciairement désigné pour déterminer les travaux de reprise nécessaires, évaluer leur coût et surveiller leur réalisation par l'entreprise choisie par le maître de l'ouvrage. Les travaux préconisés par l’expert judiciaire dans son rapport final avaient été réalisés.

 

Des désordres étant de nouveau apparus sur la piscine, une nouvelle expertise avait été ordonnée et confiée à un autre expert.

 

Après dépôt du rapport, le maître d’ouvrage avait assigné notamment le premier expert judiciaire en indemnisation de ses préjudices.

 

Déboutés de cette demande par les juges du fond, au motif de l’absence de lien entre l’état actuel de la piscine et la faute de l’expert judiciaire, le maître d’ouvrage s’est pourvu en cassation.

 

La Cour de cassation censure la décision des juges du fond. Elle relève que ces derniers avaient conclu que l’expert judiciaire avait partiellement identifié l'origine du désordre initial mais n'avait pas pris les mesures nécessaires pour apprécier sa gravité et son degré évolutif et que ses préconisations étaient insuffisantes sur un plan mécanique, la conception inadaptée de l'ouvrage et les contraintes spécifiques du terrain rendant particulièrement nécessaire une étude de sol afin de préconiser des travaux de réparation adaptés et durables.

 

Il en résultait que la faute de l’expert judiciaire était à l'origine de la persistance des dommages.

 

L’expert judiciaire avait donc engagé sa responsabilité et devait en conséquence contribuer à la réparation des préjudices subis.

 

Julien PRIGENT

Avocat - Paris