
Sont justifiées par un but d'intérêt général suffisant et ne sauraient être regardées comme méconnaissant les principes du droit de la défense et de la séparation des pouvoirs garantis par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, les dispositions de l'article 102, IV, de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie qui valident, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les autorisations d'exploitation d'équipements commerciaux délivrées jusqu'au 1er janvier 2009, en tant qu'elles seraient contestées par le moyen tiré du caractère non nominatif de l'arrêté préfectoral fixant la composition de la commission départementale d'équipement commercial ayant délivré l'autorisation.
Tel est l'enseignement d'un arrêt du Conseil d'état (CE 4/5 SSR, 26-01-2011, n° 344204, SAS AUXA) qui a refusé de renvoyer devant le Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité sur la validation, par la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (loi LME), de certaines autorisations d'exploitation d'équipements commerciaux délivrées jusqu'au 1er janvier 2009.
L'article 102, IV, de la loi LME est intervenu à la suite d'un arrêt du Conseil d'Etat qui avait jugé que "l'arrêté préfectoral fixant la composition de la commission départementale d'équipement commercial appelée à statuer sur une demande d'autorisation de création d'un équipement commercial doit permettre de connaître à l'avance l'identité des personnes susceptibles de siéger par la désignation des membres qui la composent, soit, en vertu de la qualité au nom de laquelle elles sont appelées à siéger, lorsque cette mention suffit à les identifier, soit, dans l'hypothèse où un membre peut se faire représenter par l'indication nominative de la personne qui pourra le représenter" (CE 4/5 SSR, 16-01-2008, n° 296528, SOCIETE LEROY MERLIN).
Le Conseil d'Etat avait déjà considéré que ces dispositions ne portaient pas atteinte au droit à un procès équitable garanti par les stipulations de l'article 6 paragraphe 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dans la mesure où ne sont pas contraires à ce texte les mesures législatives à portée rétroactive dont la conséquence est la modification des règles que le juge doit appliquer pour statuer sur des litiges dans lesquels l'Etat est partie, dès lors que l'intervention de ces mesures est justifiée par des motifs impérieux d'intérêt général, ce qui était le cas pour l'article 102, IV, de la loi LME (CE 4/5 SSR, 18-11-2009, n° 307862, SOCIETE ETABLISSEMENTS PIERRE FABRE).
Dans l'arrêt rapporté, et dans la droite ligne de sa décision du 18 novembre 2009, le Conseil d'Etat a estimé que les dispositions du IV de l'article 102 de la loi du 4 août 2008 sont justifiées par un but d'intérêt général suffisant et ne sauraient être regardées comme méconnaissant les principes du droit de la défense et de la séparation des pouvoirs garantis par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
En conséquence, la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présentait pas un caractère sérieux justifiant son renvoi au Conseil constitutionnel.
Julien PRIGENT
Avocat - Paris